La pratique de la pharmacie est très loin de se limiter aux comptoirs des officines. Les orientations professionnelles des docteurs en pharmacie sont très variées et malheureusement peu connues du grand public. Cet article a pour objectif d’apporter une vue d’ensemble du déroulé des études de Pharmacie et des différents débouchés professionnels.

 

Les différentes années d’études de Pharmacie

De par la grande diversité des notions enseignées, ces études constituent un cursus très diversifié qui reflète parfaitement l’étendue des métiers associés.

 

La 2ème année de Pharmacie (DFGSP2)

La 2ème année (Diplôme de Formation Générale en Sciences Pharmaceutiques 2), communément appelée « P2 » est celle qui suit directement l’année de concours (dans le cadre de l’admission en pharma par le PASS). Cette année est principalement axée sur l’étude des sciences fondamentales (chimie, physique, physiologie, botanique, biologie, science du médicament, galénique…) Les enjeux de cette deuxième année seront d’acquérir un socle de connaissances de base. Beaucoup de notions générales abordées trouveront ainsi une application concrète en 3ème  année. Certains exemples sont mentionnés dans le tableau suivant :

 

Principes étudiés en 2ème année

Application thérapeutique en 3ème année

Réactions de chimie organique. Synthèse de médicaments.
Structure et métabolisme des bactéries. Diagnostic des infections bactériennes et modes d’action des antibiotiques.
Évolution des parasites et interactions génomiques avec l’hôte. Symptomatologie des parasitoses humaines, leur diagnostic et leur traitement.
Principes et méthodes de base en biologie moléculaire. Utilisation du séquençage, de la spectrométrie de masse, de la PCR ou du Western-Blot pour identifier des agents infectieux.
Chimie analytique : identification et dosage de substances par diverses méthodes. Dosages sanguins en biochimie et analyse de bilans biologiques.
Voies métaboliques chez l’Homme et principes de base en biochimie. Physiopathologie et symptomatologie des pathologies biochimiques, des dyslipidémies et des désordres hormonaux, comment les diagnostiquer et comment les traiter.
Étude détaillée du système immunitaire.

 

  •  Maladies auto-immunes.
  • Vaccination.
  • Utilisation d’anticorps en médecine humaine.
Étude du sang. Diagnostic et traitement des maladies du sang (génétiques, cancéreuses ou anémiques).

La 3ème année (DFGSP3) :

Dès la 3ème année, que les étudiants appellent « D1 », les enseignements ont une portée beaucoup plus concrète. Plus aucun cours de science fondamentale n’est dispensé, toutes les matières visent à enseigner la prise en charge des patients sous toutes ses formes (sémiologie et physiopathologie, méthodes de diagnostic, traitements médicamenteux, précautions à prendre et risques associés).

 

Exemples de notions abordées en 3ème année :

  • Pathologies cardiovasculaires et médicaments employés en cardiologie.
  • Désordres biochimiques et hormonaux : diagnostic et traitements + Analyse de bilans biologiques.
  • Différentes formes de cancers, leurs traitements et certaines maladies auto-immunes.
  • Pathologies infectieuses d’origine bactériennes, virales et parasitaires : Diagnostic et Traitements. (Étude très détaillée des différentes classes d’antibiotiques).
  • Pathologies du sang : Diagnostic et traitements.
  • Toxicologie et traitements des intoxications aiguës ou chroniques.
  • Biotechnologie et production de médicaments biologiques innovants.

 

C’est également dès la 3ème année que les différentes classes de médicaments commencent à être enseignées. Les pharmaciens sont formés de façon à devenir des spécialistes du médicament ; ces enseignements seront donc extrêmement complets.

 

A titre d’indication, pour chaque classe médicamenteuse, il conviendra de maîtriser :

  • Les différentes molécules présentes dans la classe (souvent nombreuses : par exemple, il existe 26 antidépresseurs sur le marché en France en 2022).
  • Le mécanisme d’action.
  • La voie d’élimination du médicament (si éliminé par voie rénale, il sera contre-indiqué chez l’insuffisant rénal…)
  • Les structures chimiques et leurs conséquences sur l’effet du médicament
  • Conditions d’utilisation et quelle molécule favoriser chez les patients à risque (femme enceinte, patient âgé, insuffisant rénal ou hépatique…)
  • Les interactions médicamenteuses (il est essentiel de les maîtriser et surtout de savoir les repérer rapidement lorsqu’il y en a sur l’ordonnance d’un patient).

 

Cela peut paraître énorme, rapporté au nombre de classes médicamenteuses. Mais il faut garder en tête que les enseignements sont transversaux et permettent en réalité d’aborder ces notions progressivement et sous de nombreux aspects. Ces éléments sont répétés tout au long des études et se retiennent presque inconsciemment si on sait travailler de manière stratégique. De plus, ces notions sont d’une utilité indiscutable et concrète, donc passionnantes à apprendre et à mettre en application.

 

La 4ème année (DFASP1)

Le premier semestre de la 4ème année (Diplôme de formation Approfondie en Sciences pharmaceutiques 1, ou encore « D2 »)

Il constitue un tronc commun et s’établit dans le prolongement de la 3ème année. On étudie de nouveaux agents infectieux, de nouveaux toxiques (programme de toxicologie centré sur les drogues et l’addictologie) ainsi que de nouvelles classes de médicaments (programme centré essentiellement sur les médicaments utilisés en psychiatrie et en neurologie).

La connaissance des champignons français est également enseignée car elle fait encore partie des compétences exigées par les pharmaciens, surtout en officine (identification des paniers ramassés et détection des espèces toxiques pour protéger les patients des confusions possibles).

A titre d’exemple : A gauche des girolles (bons, comestibles) et à droite des Clitocybes (toxiques).

 

des girolles comestiblesdes clitocybes, un champignon toxique

 

Le 2ème semestre de la 4ème année

Il commence par le choix des filières. Les enseignements seront donc spécifiques et ne suivront plus un tronc commun comme auparavant (Voir grand V). Au mois de mars a lieu à Toulouse l’examen du CSP (Certificat de Synthèse Pharmaceutique). Il s’agit d’un examen oral au cours duquel l’étudiant doit répondre à de nombreuses questions sur des cas cliniques transversaux qui font appel aux connaissances dispensées depuis la 2ème année (questions mélangeant très fréquemment bactériologie, hématologie, botanique, pharmacologie, chimie thérapeutique et effets indésirables ou contre-indications de médicaments variés).

Cet examen peut être effrayant mais il est en général bien réussi par les étudiants qui travaillent régulièrement depuis le début. Le but n’est pas de tout relire au dernier moment (impossible vu la quantité de notions) mais de retenir les informations essentielles de chaque enseignement et de les mobiliser le jour J (entraînement pour la vie réelle professionnelle…).

Le choix de filière

Lors du second semestre de la 4ème année, les étudiants suivent l’enseignement spécifique propre à la filière qu’ils ont choisie. Il existe 4 filières, dont 3 définissent un cycle d’étude « court » (6 ans en comptant le PASS pour obtenir le doctorat) et dont 1 seule, celle de l’internat, définira un cycle long (9 ou 10 ans).

Il est important de constater la diversité des filières proposées car elle est à mettre en lien avec l’immense étendue des rôles que peuvent jouer les pharmaciens dans le système de soin Français.

 

Filière Officine

  • Apprentissage du fonctionnement d’une pharmacie de ville (économie, médicaments++).
  • Sensibilisation à l’analyse d’ordonnance et au conseil pharmaceutique.
  • 6 années d’études avec thèse d’exercice conférant le diplôme de Docteur en pharmacie.

 

Filière Industrie

  • Approfondissement des notions relatives à l’industrie pharmaceutique (Recherche et développement de nouveaux médicaments, production, contrôle qualité, rôles variés au sein des grandes firmes pharmaceutiques).
  • Possibilité d’associer une formation supplémentaire en école de commerce ou un master de Droit (doubles cursus possibles) pour éventuellement se spécialiser en marketing ou en Droit pharmaceutique.
  • Possibilité de carrière à l’international ou dans des grands groupes pharmaceutiques.
  • 6 années d’études pour l’obtention du doctorat (pour la voie classique…)

 

Filière recherche

  • Initiation aux méthodes expérimentales dans les différents domaines de la santé.
  • Promotion de l’innovation pharmaceutique et de l’amélioration des thérapeutiques ou des outils de diagnostic.
  • Filière de plus en plus délaissée…
  • Possibilité d’associer une thèse en Sciences.
  • 6 années d’études (sans compter les stages de recherche et les années de césure proposées).

 

Filière internat

  • Uniquement accessible sur concours national, passé en Décembre de la 5ème année.
  • 2 orientations possibles en fonction du classement au concours :
    • Biologie Médicale (bactério, viro, parasito, hémato, biochimie, reproduction
    • Pharmacie Hospitalière.
    • IPR : Innovation Pharmacie et Recherche
  • Cycle long : après la 5ème année, la formation dure 4 ans (5 pour être radio-pharmacien).
  • Possibilité de passer sa thèse avant la fin de l’internat (titre de Docteur junior).
  • Stages variés dans les différentes spécialités puis spécialisation au fil des stages…
  • Obtention d’un doctorat et d’un DES (Diplôme d’Études Spécialisées).
  • Possibilité d’exercer dans le publique (Hôpitaux) ou le privé (Laboratoires d’analyse ou Cliniques).

 

Remarque : Les étudiants peuvent présenter le concours à 2 reprises. En cas d’échec lors de la 2ème tentative, il existe des passerelles pour les transférer dans l’une des 3 autres filières.

Une fois le pharmacien diplômé (peu importe la filière), il existe la possibilité de passer des DU (Diplômes Universitaires). Ce sont des formations complémentaires facultatives pouvant permettre de compléter ses connaissances ou d’étendre ses compétences.

 

organigramme des études de Pharmacie

 

L’externat

La 5ème année est qualifiée d’hospitalo-universitaire, dans la mesure où les étudiants sont amenés à réaliser leur « Externat ». Pour résumer, les étudiants passent la moitié de leur temps à la fac (souvent l’après-midi) et l’autre moitié de leur temps à l’Hôpital (souvent le matin), et ce sur plusieurs mois.

Cela vise à faire découvrir aux étudiants de toutes filières la prise en charge des patients à l’Hôpital (réception, stockage et délivrance des médicaments, vérification des ordonnances faites par les médecins et communication avec ces derniers, conseil au patient…). L’étudiant externe n’est pas un stagiaire, il n’est pas là pour observer, il doit être acteur et se voit souvent confier diverses missions comme par exemple la conciliation médicamenteuse d’entrée :

Entretient avec les patients récemment admis pour faire le point avec eux sur les médicaments qu’ils prennent chez eux, pour pouvoir leur donner à l’hôpital (très important si le patient prend un traitement chronique par exemple). Cet exercice est très important car souvent les patients ne connaissent pas le nom de leur médicament… L’externe peut donc leur montrer des photos de boites, discuter de l’aspect visuel des comprimés, ou encore contacter la pharmacie du patient…

 

Les stages

Plusieurs stages (non-rémunérés) sont obligatoires au cours du cursus pharmaceutique et visent à mettre en application les enseignements de manière plus réaliste. Le stagiaire pourra analyser des ordonnances, s’entraîner à repérer des interactions médicamenteuses, s’exercer au conseil pharmaceutique, et ce dès la deuxième année, sous le contrôle d’un pharmacien.

Ces stages s’effectuent en officines (pharmacies de ville).

Même si de nombreux étudiants se destineront vers les filières Recherche, Internat ou Industrie, ils seront tous in fine des docteurs en Pharmacie. Il est donc important que ces professionnels de santé connaissent le fonctionnement d’une pharmacie de ville.

 

Remarque : certaines étudiants, sur dérogation, peuvent effectuer leurs stages de 3ème et/ou de 4ème année à l’Hôpital, dans une pharmacie à usage intérieur (PUI). Ceci offre une expérience entièrement différente et se montre particulièrement intéressant pour les étudiants qui souhaiteraient passer le concours de l’internat et se spécialiser en Pharmacie Hospitalière. Mais les places disponibles sont très limitées.

  •  2ème année : Stage d’observation de 1 mois en officine.
  • 3ème année : Stage d’application de 2 semaines en officine (ou en PUI).
  • 4ème année : Stage d’application de 2 semaines en officine (ou en PUI).

Pour les années suivantes, seuls les étudiants de la filière officine continueront leurs stages en pharmacie. Les autres étudiants réaliseront des stages spécifiques à leur filière (laboratoire de recherche, industrie pharmaceutique…)

Les étudiants de la filière Internat n’auront pas de stage de 5ème année car ils préparent le concours.

 

Les débouchés et variabilité des activités des docteurs en pharmacie

Ne sont présentées ci-dessous que les orientations professionnelles les plus fréquentes. Il existe des pratiques professionnelles plus anecdotiques (pharmacien inspecteur des ARS, enseignant chercheur etc…)

 

 Filière Officine

Possibilité d’ouvrir ou plus souvent de racheter une pharmacie (Pharmacien titulaire) ou d’être employé dans une pharmacie déjà existante (Pharmacien adjoint).

 

Filière Industrie

Diverses spécialisations, fabrication du médicament, mise en forme galénique, contrôle du produit fini, inspection des matières premières, développement de nouvelles substances, communication, management, Droit pharmaceutique…

 

Filière Recherche

Direction d’une équipe de recherche au sein d’un laboratoire. Participation à l’innovation pharmaceutique.

Possibilité de compléter sa formation pour devenir Enseignant Chercheur à la faculté (aussi possible par les autres filières…)

 

Filière Internat

  • Pharmacien Hospitalier :

Analyse et validation d’ordonnances, gestion de stock, autorisation de délivrance des médicaments, missions très variées.

 

  • Biologiste Médical :

Diagnostic de maladies infectieuses sur échantillons biologiques de patients (bactéries, virus, parasites) et aide à la prescription (discussion avec le médecin prescripteur). Diagnostic de pathologies du sang (spécialisation en hématologie), dosages biochimiques, validation et interprétation des bilans biologiques, communication des résultats au médecin. Procréation médicament assistée. Toxicologie : prise en charge des intoxications ou dosage des médicaments à risque dans le sang des patients pour suivre leur toxicité (Suivi Thérapeutique Pharmacologique)…

Remarque : La spécialité Biologie médicale est commune aux études de Pharmacie et de Médecine. La différence entre un biologiste de formation pharmaceutique ou médicale concernera principalement le droit de prescription et le droit de réaliser des consultations médicales.

 

Conclusion

Les études de Pharmacie offrent une multitude d’opportunités professionnelles et ceci se ressent dès la 2ème année, dans la diversité et la richesse des enseignements proposés. Comme toutes les études de santé issue des filières MMOP-K néanmoins, il est important de réaliser la difficulté de ce cursus et l’imposant volume de cours dispensés chaque année (cela ne s’arrête pas après le PASS, il faut le savoir !). La clé de la réussite est de prendre du plaisir dans ce que l’on apprend, de se passionner de ces notions captivantes pour s’épanouir en tant qu’étudiant et futur praticien : Cultiver ses connaissances pour trouver sa place dans ce système de santé vertueux qu’est le nôtre.

 

https://pharmacie.univ-tlse3.fr/etudes-de-pharmacie

 

 

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